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Votre médecin traitant a-t-il le droit de mettre fin à votre suivi médical ?

Deux lignes du Code de déontologie médicale, et tout bascule : la relation entre un patient et son médecin traitant n’est jamais gravée dans le marbre. La loi encadre strictement le droit du praticien à mettre fin au suivi, balisant le terrain pour éviter l’arbitraire et bannir toute discrimination.

Mais attention, si la rupture est encadrée, la santé du patient, elle, ne doit jamais se retrouver en suspens. Continuer à garantir la prise en charge, même en cas de séparation, reste une exigence à laquelle aucun médecin ne peut déroger.

Le rôle central du médecin traitant dans le parcours de soins coordonnés

Impossible d’ignorer la place stratégique du médecin traitant dans la mécanique des soins coordonnés. C’est lui que chaque assuré déclare auprès de l’assurance maladie, c’est encore lui qui tient les rênes du dossier médical et qui, le cas échéant, oriente vers d’autres professionnels de santé. Un symptôme intrigant, une pathologie qui s’éternise ? Il aiguille, conseille, organise, pour que personne ne se perde en route : spécialiste, chirurgien-dentiste, sage-femme… tout s’articule autour de sa vision globale.

Ce lien, tissé consultation après consultation, s’appuie sur une confiance qui ne se décrète pas. Le généraliste, premier réflexe face à la moindre alerte, suit l’évolution des maladies chroniques, accompagne les personnes en affections de longue durée (ALD) et veille à ce que la prévention ne soit pas un mot creux. Il ajuste les traitements, centralise les informations, s’assure que le dossier médical partagé reste le fil conducteur de l’accompagnement.

La coordination, ce n’est pas un slogan. Elle passe par des échanges réguliers avec les autres professionnels de santé, par la transmission maîtrisée des informations (toujours avec l’accord du patient), et par une traçabilité irréprochable. Tout cela contribue à éviter les doublons, à limiter les risques d’erreur, à sécuriser le parcours de soins.

Pour assurer cette cohésion, plusieurs règles s’imposent :

  • Coordination des soins et gestion rigoureuse du dossier médical
  • Orientation adaptée vers le spécialiste, selon la situation
  • Suivi personnalisé pour chaque patient souffrant d’ALD

En somme, le médecin généraliste garde la main sur l’ensemble du parcours, du premier contact jusqu’à l’accompagnement sur le long terme, garantissant cohérence et qualité à chaque étape.

Mettre fin au suivi médical : dans quels cas et selon quelles règles ?

Le code de déontologie médicale ne laisse aucun doute : un médecin peut, sous conditions précises, cesser d’assurer le suivi médical d’un patient. Il n’existe pas d’obligation à maintenir éternellement la relation thérapeutique, mais la continuité des soins ne doit pas être sacrifiée sur l’autel d’une décision précipitée.

Les motifs légitimes qui peuvent conduire à cette décision ne manquent pas. Certains relèvent de la vie professionnelle du praticien :

  • Départ à la retraite qui impose de passer la main,
  • Déménagement hors de la zone de soins habituelle,
  • Changement de cabinet ou de mode d’exercice.

D’autres raisons touchent à la relation elle-même :

  • Mésentente durable entre patient et médecin,
  • Attitude agressive ou comportement irrespectueux,
  • Absences répétées sans justification aux rendez-vous,
  • Insistance pour obtenir des prescriptions contraires à l’éthique médicale.

Dans tous les cas, le secret médical et la qualité de la prise en charge restent la boussole du médecin. Impossible de rompre unilatéralement le contrat de soins sans raison valable. L’article 47 du code impose d’avertir le patient (hors urgence ou situation grave), et de lui laisser le temps de s’organiser pour la suite de son parcours de soins. Si le patient le demande, le médecin doit transmettre une copie du dossier médical au nouveau confrère désigné.

Avant toute rupture, le médecin doit respecter plusieurs étapes :

  • Fonder sa décision sur un motif légitime, non discriminatoire,
  • Informer le patient de façon claire et respectueuse,
  • Transmettre le dossier médical dans le respect de la confidentialité.

Rompre le suivi ne se fait jamais à la légère. Ce choix engage la responsabilité professionnelle du praticien, qui doit se montrer irréprochable sur le plan déontologique.

Cabinet médical vide avec stéthoscope et dossier

Vos droits et les obligations du médecin face à une rupture du suivi

Si le médecin traitant prend la décision d’interrompre la relation thérapeutique, la procédure ne laisse pas de place à l’improvisation. Le patient doit être prévenu, idéalement par écrit, et disposer d’un délai suffisant pour organiser la poursuite des soins. Ce temps d’adaptation est d’autant plus précieux pour les personnes fragiles ou suivies pour une affection de longue durée (ALD).

Le dossier médical n’appartient pas au médecin : il est la propriété du patient, qui peut en réclamer la transmission à son nouvel interlocuteur médical. Cette étape se fait dans le respect du secret médical et de la confidentialité. L’assurance maladie ne prévoit pas de démarches administratives complexes. Cependant, il reste conseillé de garder une trace écrite de la rupture, surtout dans le cas des maladies chroniques ou des suivis spécifiques.

Dans ces circonstances, le praticien doit respecter plusieurs obligations :

  • Informer le patient de manière transparente et compréhensible,
  • Transmettre le dossier médical rapidement,
  • Respecter les règles déontologiques et le secret professionnel.

Si le dialogue s’enlise ou si la situation devient bloquée, le patient peut s’adresser au médecin conseil de l’assurance maladie, ou solliciter l’appui du conseil départemental de l’Ordre. La fiche pratique de l’Ordre rappelle d’ailleurs que prévenir les ruptures de soins reste un enjeu prioritaire pour la profession médicale.

Au fil de ces règles et garde-fous, la relation patient-médecin s’ajuste, parfois se termine, mais ne doit jamais laisser la santé sur le bord du chemin. La vigilance et la rigueur protègent chacun, même quand la route se sépare.